« Quand apprendra tu enfin a obéir aux ordres ? » Un coup résonne. Puis un deuxième, un troisième. Le bruit du bois contre sa peau résonne dans la pièce. Austin ne montrait pas le moindre signe de rébellion. Il y était habitué. La douleur restait la même. Rien ni personne ne pouvait le sortir de cet enfer. Pas même sa mère qui observait la scène, posé sur le canapé du salon. Cette dernière pivota son regard vers la fenêtre, préférant ne pas être témoin de cet acharnement physique. Seulement âgé de dix ans, le jeune garçon ferma les yeux. Son père le frappa une nouvelle fois au visage. « Monte dans ta chambre, et n'en ressors pas avant d'avoir changer d'attitude. » Sans rechigner, il frotta son t-shirt poussiéreux avant de monter les marches menant à sa chambre. Il entra dans la pièce et s'allongea sur son lit. La douleur était bien plus mentale que physique. Endurer ça a un si jeune âge ne lui semblait pas normal. Personne ne devrait subir ça, et pourtant, il gardait le silence. Il savait pertinemment que les représailles seraient bien plus graves s'il osait dire quoi que ce soit. Son regard fixé au plafond, il se perdit dans ses pensées. Tout ça, il l'endurait depuis plus de six ans. Six ans à pleurer. Six ans à essuyer le sang qui coulait hors de son nez ou sur son dos amaigri. Chaque matin, il tentait de cacher ses marques à l'aide de pansements ou de maquillage. Aucun de ses amis ne semblait avoir remarqué ces traces. Du poids, il en avait perdu. Plus de dix kilos en seulement deux semaines. Il ne vivait pas comme la plupart des garçons de son âge. Par habitude, ou seulement par peur, le mécheux passait la plupart de ses journées enfermer dans sa chambre. L'argent n'avait jamais été un problème chez eux, mais le manque d'amour fraternel, si. Par chance, il pouvait compter sur l'aide de sa tante. Éloigné de sa famille après avoir révélé son homosexualité, Nicola essayait chaque jour, du mieux qu'elle le pouvait, d'effacer les douleurs que subissait son neveu. De lui redonner un peu de baume au coeur. Son sourire et ses cheveux blonds faisaient d'elle une femme particulièrement agréable à regarder. Il était reconnaissant de tous les efforts qu'elle faisait pour lui redonner le sourire. Austin se releva doucement de son lit. Il s’essaya sur la chaise face à son bureau avant d'attraper un crayon et une feuille. La musique était une passion. C'était ça, sa seule échappatoire. Il griffonna quelques mots avant d'esquisser un léger sourire. Son avenir était déjà tracé. La musique ferait partie de sa vie. C'était certain.


« Dernier appel pour le vol n°755 en direction de San Francisco ! » « C'est le mien... » soupira-t-il, en tenant fermement sa valise a la main. Nicola se trouvait face à lui. Alors âgé de 17 ans, le jeune homme s'apprêtait à tout quitter. Fuir l'Angleterre pour aller vivre aux Etats-Unis. Ici, plus rien ne le retenait. Sa tante lui avait offert un aller simple pour San Fransisco et par la même occasion, il avait reçu une lettre confirmant son achat de logement. Austin baissa un moment les yeux. Était-ce donc réel ? Le sourire aux lèvres, il se rapprocha de la blonde et la serra dans ses bras. S'il en était arrivé là, c'était bel et bien grâce à elle. Il la remercia une énième fois avant de desserrer leur étreinte. Sa valise en main, il lui adressa un dernier regard avant de se diriger vers la porte d'embarquement. Dix heures de vol. Le temps lui paraissait si long. Premier voyage hors de l'Europe. « Mesdames et messieurs, nous allons débuter l'atterrissage. Veuillez attacher votre ceinture et rester calme. Merci de votre compréhension. » le mécheux sursauta. Il attrapa distraitement la main de son voisin en sentant l'appareil se poser au sol. Se mordant la lèvre inférieure, il retira sa main nonchalamment. « Excusez- moi... » Il suivit les passagers et sortit de l'avion. Maladroitement, il se dirigea vers le tapis et récupéra sa valise noire. Le jeune anglais quitta l'aéroport le plus rapidement possible, monta dans un taxi et lui indiqua l'adresse de sa nouvelle demeure. Une boule se forma au niveau de son estomac. L'anxiété. L’appréhension. San Francisco était une grande ville. Lui était seul. Dès qu'il passera la porte de cette maison, sa vie prendra une tournant. Ce cauchemar n'était désormais qu'un lointain souvenir. La voiture se stoppa. Il remercia le chauffeur, paya la course et sortit du véhicule. Cette maison est immense, pensa-t-il en examinant les lieux. Son déménagement était fait. Ainsi commençait sa nouvelle vie.